Thomas Delphis : « Il faut que j’impose ma course »

Crédit photo Nicolas Mabyle / DirectVelo

Crédit photo Nicolas Mabyle / DirectVelo

C’est une situation assez rare pour être soulignée. Cette saison, Thomas Delphis porte toujours le maillot de la formation AG2R Citroën U23 alors même que, dans son histoire, le “CCF” n’a pratiquement jamais donné l’opportunité à des athlètes de faire partie du groupe en ayant 22 ans ou plus. Autrement dit, en n'appartenant plus à la catégorie Espoirs. Les derniers exemples en date n’étaient autres que ceux de François Bidard et de Jordan Sarrou. Et voilà que le solide rouleur, Champion de France Espoirs du contre-la-montre en 2020 et multi-médaillé dans la discipline, s’ajoute donc à cette petite liste.

“Cette fois-ci, c’est vraiment sa dernière année au centre. Mais quand tu vois ce qu’il fait en chrono, tu te dis que c’est impossible qu’il n’ait pas de résultats sur la route. Et pourtant, pour l’instant, il n’en a pas. Comme il a commencé le vélo à 18 ans, on pensait d’abord qu’il avait des lacunes techniques. Mais aujourd’hui, ces lacunes-là ne sont plus valables”, analyse Loïc Varnet, le technicien historique de la réserve d’AG2R Citroën. “On a vu à l’Étoile d’Or ou au Tour du Loir-et-Cher qu’il savait faire, techniquement. Ce qui lui manque, c’est la confiance de la première victoire car, en fait, il n’a jamais gagné une course. Avec le collectif qu’on a, si un jour il se retrouve dans l’échappée et qu’il peut partir de loin, je sais que les autres feront le boulot pour lui. Mais il faut cette première victoire. Ce n’est pas un problème d’implication car c’est une vraie perle. Il mériterait d’être essayé au-dessus car les schémas des courses pros lui seront plus avantageux. Il s’y retrouverait davantage”. En marge du stage de l’équipe savoyarde à Vogüé, en Ardèche, DirectVelo a fait le point avec Thomas Delphis.

DirectVelo : As-tu été surpris de pouvoir rester au sein de l’équipe AG2R Citroën U23 alors même que tu n’es plus Espoir cette saison ?
Thomas Delphis : Loïc (Varnet) m’avait proposé cette solution assez tôt dans la saison, au mois d’août, donc je n’avais pas forcément réfléchi à l’avenir à ce moment-là. Forcément, cette proposition a pesé dans la balance au moment de prendre une décision. J’avais eu deux/trois contacts à l’étranger, dont un avec une équipe du WorldTour, en grande partie grâce à mes données. En plus, c’était plutôt bien engagé alors je ne m’étais pas trop posé de questions quant au fait de rester chez les amateurs. Dans ma tête, c’était quasiment fait pour les pros alors je ne m’étais pas trop penché sur les autres possibilités. 

Tu as donc dû être particulièrement déçu de rester chez les amateurs…
J’ai appris après les Championnats du Monde que ça n’allait pas le faire pour les pros. L’arrêt de l’équipe NTT (le Team Qhubeka NextHash, NDLR) a beaucoup joué, malheureusement. Ils ont pris d’autres mecs de cette équipe à la place. En plus, j’ai arrêté ma saison sur ça. J’ai pas mal cogité les semaines suivantes…

« SI J’AVAIS LA SOLUTION… »

On a déjà abordé plusieurs fois tes difficultés à performer lors des courses en ligne alors que tu excelles dans l’exercice du contre-la-montre. Comment expliques-tu que la situation reste la même à l’amorce de cette saison 2022 ?
Si j’avais la solution, je l’aurais déjà résolu et la question ne se poserait plus. Mais j’y travaille. Il faut sans doute que je trouve mon style de courses, aussi. Je sens que je m’en rapproche mais je ne dois pas subir les courses et m’adapter par rapport à mes principales qualités. Je ne suis pas un coureur explosif donc je ne peux pas attendre le sprint ou la dernière bosse. Il m’en manquera toujours. Mon jeu serait de partir de plus loin, de prendre des échappées… Il faut que j’impose ma course pour peser sur le final. 

Cibles-tu d’ores-et-déjà certaines courses en particulier ?
Je pense à fin mars/début avril, avec notamment la Boucle de l’Artois. Il y a un chrono assez long sur la course et c’est assez rare. Alors pourquoi ne pas essayer de jouer un bon classement général, surtout que ce sera en Coupe de France. Je pense aussi à Annemasse-Bellegarde, une course qui se dispute à côté de chez moi donc ce sera important. 

« IL FAUT AUSSI CONSOLIDER SES ATOUTS »

Puisque tu sembles avoir les qualités physiques pour performer sur la route, n’y aurait-il pas un aspect et un blocage psychologique derrière tout ça ?
J’étais beaucoup fixé sur les autres jusque-là, je pense. J’attendais que la course se passe en subissant. Et comme je ne suis pas dans les meilleurs sur les fins de course, sur l’explosivité, je n’arrive pas à être acteur. Mais encore une fois, je dois miser sur mes propres qualités comme l’endurance. Je dois épuiser les autres. Je sais que je peux aller loin et être bon sur des efforts longs. Je pense qu’il ne m’en manque pas beaucoup. J’ai déjà eu des résultats. Les objectifs que j’avais en chrono, je les ai remplis. J’ai été performant là où on me demandait de l’être. Maintenant, il suffirait de deux/trois gros résultats sur les courses en ligne pour prouver que j’ai les capacités de passer au-dessus. 

Le contre-la-montre reste tout de même ton atout principal, bien sûr. Continues-tu de travailler spécifiquement cette discipline ou, de par les enjeux décrits précédemment, tu pourrais avoir tendance à moins en faire dans ce domaine-là ?
J’ai travaillé autre chose que le chrono car, justement, il faut être plus complet. De toute façon, il n’y a pas beaucoup de chronos en début de saison. Cet hiver, je ne me suis donc pas trop concentré sur le chrono. De toute façon, je sais que quand je remonte sur le vélo de chrono, je m’y refais très vite. Délaisser la discipline pendant l’hiver n’est pas un problème. Cela dit, même s’il faut améliorer ses faiblesses, il faut aussi consolider ses atouts. Être très performant sur les chronos montre que tu as des capacités physiques importantes. Forcément, je veux gagner des chronos et je viserai le Championnat de France chrono. Mais je pense aussi à la course en ligne de ces mêmes Championnats. Ce seront deux objectifs. 

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