Emmanuel Morin : « Je me sens chanceux »

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

La fin de carrière est passée près. Non conservé par Cofidis en fin de saison dernière, Emmanuel Morin était dos au mur pour conserver sa place chez les professionnels. Ce ne sera plus en WorldTour, mais en Continental, sous les couleurs du Team U Nantes Atlantique qu’il a trouvé refuge. À l’occasion de la journée de présentation de sa nouvelle équipe, le coureur de 26 ans est revenu avec DirectVelo sur la fin d’année 2021, entre stress et soulagement. Emmanuel Morin évoque la fin malheureuse avec Cofidis, malgré sa 2e place sur la Route Adélie de Vitré, son rebond à Nantes, et son état d’esprit durant ces longs mois avec de retrouver la compétition chez les professionnels, dans quelques jours.

DirectVelo : Comment te sens-tu à quelques jours du coup d’envoi de la saison ?
Emmanuel Morin : C'est imminent, la préparation s'est bien passée. J'ai hâte de remettre un dossard. Je réalise la chance que j'ai d'être encore professionnel, ça aurait pu s'arrêter brutalement l'an dernier. Nantes et Anthony (Ravard) me laissent une seconde chance de montrer réellement mes capacités et faire des résultats. J'ai à cœur de les remercier. En essayant de lever les bras cette année.

Te sens-tu soulagé ? Car tu es passé près de n'avoir aucun contrat...
Oui, clairement ! Je me sens chanceux. Il y en a pour qui ça s'est arrêté brutalement. J'ai à cœur de montrer mon véritable niveau. Je l'ai montré en fin d'année dernière, et en 2020 où j'ai fait une belle saison chez Cofidis. Il n'y a aucune raison que ça ne se passe pas pareil chez Nantes et que je n'arrive pas à lever les bras.

« C’EST UN PEU DOMMAGE QUE ÇA SE TERMINE COMME ÇA »

Tu as eu quelques résultats, as-tu été surpris et déçu que Cofidis ne te propose rien ?
J'ai été surpris, oui. Surtout que j'avais eu un entretien avec Cédric Vasseur qui m'avait dit qu'il me manquait juste un résultat pour que je resigne. Puis j'ai fait 2e sur la Route Adélie, mais depuis je n'ai plus eu le moindre contact avec lui. C'est un peu dommage que ça se termine comme ça. J'aurais préféré qu'il m'appelle et me dise que je ne rentre pas dans les plans pour 2022. Plutôt qu'il me laisse attendre comme ça. Mais c’est ainsi. Le Team U Nantes me donne une chance. Anthony m'a contacté quelques jours avant la Route Adélie. Donc après, n'ayant aucune nouvelle de Cofidis, j'ai dit oui rapidement. Le projet me plaisait vraiment. Étant nantais, être dans une équipe pro ici, c'est quand même pas mal.

Les derniers instants avant de trouver refuge à Nantes ont été difficiles à vivre ?
Je ne l'ai pas forcément bien vécu. J'avais deux sons de cloche. On me disait que je devais faire le travail d'équipier, c'était mon rôle dans l'équipe. Et à côté on me reprochait de ne pas faire de résultats. Mais je ne peux pas faire les deux. Je l'ai bien démontré en fin de saison. Sur la Route Adélie, je l'ai dit dès le briefing qu'on attendait un résultat de ma part, donc je ne pouvais pas rouler pour les autres. Et je fais 2e. Mes coéquipiers l'ont très bien compris et eux-mêmes étaient surpris que je ne resigne pas. J'ai toujours fait le travail à 200% pour eux. Je pense à la Vuelta en 2020 auprès de Guillaume Martin. Je roulais tous les jours pour lui et je fais quand même deux Top 10 au sprint, avec la 6e place à Madrid. Et Guillaume me l'a très bien rendu en me protégeant dans le final, peu de personnes l'auraient fait, d'autant qu'il avait le maillot à pois sur les épaules. Cofidis est une page qui se tourne. Maintenant je vais en écrire une nouvelle avec Nantes, et j'espère qu'elle sera très belle.

« J’AVAIS DÉJÀ EU UN ENTRETIEN POUR VENIR DANS LA N1 »

Est-ce que ce monde du WorldTour et du très haut niveau t'a laissé un goût un peu amer ?
Je pense que ça va plus me faire progresser qu'autre chose. Je préfère tirer le positif que revoir le négatif. Le positif attire le positif. Ça aurait pu s'arrêter brutalement, j'ai la chance de repartir donc je vais la saisir. Même si l'expérience Cofidis ne s'est pas très bien terminée, retourner au niveau WorldTour est un rêve. Je rêve de participer aux grandes courses comme Paris-Roubaix ou le Tour à l'avenir. J'ai déjà pu faire de belles courses et je compte y retourner.

Tu n'avais que Nantes comme contact ?
Il n'y a eu qu'eux, mais j'aurais peut-être pu avoir d'autres opportunités plus tard. Mais pour moi c'était la continuité, Anthony m'avait présenté le projet, je l'ai rencontré. J'avais déjà eu un entretien à l'époque où j'étais chez Sojasun, pour venir dans la N1. Ça ne s'était pas fait car je ne voulais pas changer d'équipe tous les ans, mais le projet me correspondait déjà. Je savais que j'aurais pu être amené à travailler avec Anthony à l'avenir. Ça s'est fait cette année, ça aurait pu être plus tard. Mais je sais que ce sera un élément marquant dans ma carrière, et un élément déclencheur pour plein de choses.

« LÀ JE SAIS QUE MON TRAVAIL SERA DE FAIRE DES RÉSULTATS »

Tu n'étais donc pas prêt à revenir chez les Amateurs ?
Je pense que j'aurais arrêté. Et j'aurais vraiment vécu ça comme un échec. Que ça se termine comme ça, brutalement... Je ne me voyais pas revenir en amateurs ensuite. Je me serais laissé un temps de réflexion. C'est difficile à dire, mais je ne préfère pas y penser. En tout cas je l'aurais vécu bien différemment qu'en signant à Nantes. Et je préfère penser à ça.

Tu vas découvrir ce rôle de leader au niveau professionnel, ressens-tu une certaine pression ?
Oui et non. Une pression pour les résultats forcément, mais ce ne sera pas négatif, comme j'ai pu connaître par le passé où je faisais mon travail mais qu'on me reprochait de ne pas faire de résultats, alors que ce n'était pas ce qu'on me demandait. Là je sais que mon travail sera de faire des résultats, je n'aurai rien d'autre à faire. Alors je vais me concentrer sur ça, et je pense que ça va me servir. Par rapport à mon rôle, au-delà des courses, je vais vraiment apporter mon expérience et épauler les jeunes sur et en dehors du vélo. Ça me plait aussi d'apporter mon expérience et mon ressenti sur le WorldTour, les Grands Tours... J'ai énormément appris en trois ans chez Cofidis, donc je vais essayer de le transmettre aussi.

« REVENIR SUR LE SCHÉMA QUE J’UTILISAIS EN AMATEURS »

Comment tu te vois dans les années à venir ? Après avoir connu les grandes courses du WorldTour, ce n'est pas toujours facile de redescendre sur les Classe 2...
J'ai vachement relativisé cet hiver. J'ai pris le temps de me poser et réfléchir à la situation. J'ai réalisé beaucoup de choses pendant la trêve. Grâce à ce recul, je vais aborder les courses différemment et être beaucoup plus serein. Même si j'aurai la pression du résultat, je pense que je serai beaucoup plus posé et ça va me servir. Certains auraient vécu le fait de redescendre comme un échec, mais moi je ne vois pas les choses comme ça. Ça va être une belle étape dans ma carrière et pourquoi pas vraiment me lancer et être le tremplin.

Tu as déjà coché quelques courses ?
Ce sera plus des périodes. Le début de saison va permettre de me tester. Mais je pense au mois de mars avec la Classic Loire-Atlantique et Cholet. Je vais viser ces deux courses, en plus en étant natif de Nantes, performer ou lever les bras sur une course locale, ce sera beau si j'y arrive. Sinon le Tro Bro Leon, le Championnat de France à Cholet, ce seront des points importants de ma saison. Mais je vais plus viser des pics de performance sur certains mois, au lieu de me fixer des courses en particulier. C'est difficile d'arriver prêt sur un jour, alors je vais changer ma façon de faire et revenir sur le schéma que j'utilisais en amateurs. C'est-à-dire me concentrer sur une période et viser le plus de résultats possible sur ce bloc.

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