Steve Chainel : « L’impression que l’aventure se terminait »

Crédit photo Alexis DANCERELLE / DirectVelo

Crédit photo Alexis DANCERELLE / DirectVelo

En temps normal, Steve Chainel est un homme particulièrement occupé. À la fois coureur, manager de son équipe de cyclo-cross - le Team Chazal-Canyon-3G Immo - et consultant pour Eurosport, le Vosgien n’a pas franchement le temps de s’ennuyer. Comment vit-il donc la période de confinement qui a pris effet ce mardi à midi ? Quelles conséquences pour ses différentes activités ? DirectVelo fait le point avec l’ancien Champion de France de cyclo-cross.

DirectVelo : On te sait très actif d’ordinaire. Comment vis-tu ces premiers jours de confinement ?
Steve Chainel : C’est une situation exceptionnelle qu’il faut accepter. C’est sûr qu’en temps normal, j’ai différentes casquettes et je suis multi-tâches avec pas mal d’activités. Là, tout tourne au ralenti mais c’est comme ça. On ne peut rien y faire. On ne peut qu’accepter cette situation. Tout ne s’arrête pas non plus. On s’organise par exemple des rendez-vous sur ordinateur ou au téléphone, avec différents partenaires, pour préparer l’avenir. J’en profite par exemple pour faire le bilan du dernier hiver de cyclo-cross avec eux, alors que c’était prévu pour un petit peu plus tard. Le plus compliqué, c’est de toujours être au même endroit, à la maison. Mais je ne veux surtout pas me plaindre : je fais partie des chanceux puisque j’ai un grand jardin de 5000. Je peux bouger et m’occuper avec ma petite famille.

« IL SUFFIT DE S’ADAPTER »

À quoi va ressembler ton quotidien dans les prochains jours ?
Comme j’ai deux enfants, le matin, je me transforme en instituteur (sourires). Ma copine me donne un petit coup de main pour que les deux petits soient “à l’école” au même moment. L’après-midi, s’il fait beau, on sort dans le jardin et on s’occupe sans aucun problème : foot, basket, hockey sur gazon… Je trace aussi des petits parcours de vélo pour les enfants. On s’occupe, pour passer le temps. On doit prendre tout ça comme une occasion de se retrouver, avec ma copine et les enfants, le plus simplement possible. Nous ne sommes pas dans une situation de crise catastrophique à la maison. Il y a de quoi s’occuper. Il suffit de s’adapter.

Et financièrement ?
C’est plus embêtant de ce côté là en effet. Mon seul revenu aujourd’hui, c’est Eurosport. J’y suis consultant, pigiste prestataire alors quand il n’y a pas de course, il n’y a pas de revenu… C’est forcément un peu plus compliqué en ce moment mais je ne suis pas le genre de sportif qui a besoin de rouler en BMW. J’ai épargné et aujourd’hui, tout ce qui compte, c’est que je puisse donner à manger à mes enfants à la fin du mois. Heureusement, je ne suis pas dans la merde et je n’ai pas le couteau sous la gorge en me disant qu’il faut absolument que les compétitions reprennent avant telle ou telle date.

Ta dernière pige à Eurosport, justement, était durant ce si particulier Paris-Nice. Comment as-tu vécu cette semaine entre Plaisir et Nice ?
C’était bizarre. Chaque jour, on avait l’impression qu’il allait se passer quelque chose de nouveau. Dès le début, je me doutais que l’on n’irait pas jusqu’à Nice. Au fil de la course, on s’est rendu compte qu’il s’agissait du dernier événement sportif qui avait encore lieu. Sur la course, je sentais que mon chef Guillaume Di Grazia voulait profiter de chaque moment à l’antenne. Nous étions dans notre petite bulle avec Jacky (Durand), les preneurs de son, la réalisation… Mais c’était vraiment étrange. On avait l’impression que l’aventure se terminait. Un peu comme si c’était la fin du Tour de France. Le samedi, d’un coup, ça fait “boom” ! Il n’allait plus y avoir de vélo pendant une durée indéterminée et ça m’a fait drôle.

« ON NOUS DEMANDE DE LE FAIRE ALORS RESPECTONS LES CONSIGNES »

Arrives-tu à te projeter sur la suite des événements ?
C’est compliqué. Beaucoup de choses ont été dites ou faites. J’ai du mal à imaginer une saison sans Tour de France mais qui sait… En plus, quand je vois l’incivisme de certains, ce n’est pas gagné. Pourtant, au plus les gens réagiront vite, et au plus vite on pourra tous reprendre notre vie normalement. Pour l’instant, on voit encore des gens aller rouler ou courir… Chacun y va de sa propre interprétation.

Qu’as-tu envie de dire à ces gens-là ?
Je pense très sincèrement que l’on ne peut pas critiquer la manière de penser et de raisonner des individus. Chacun est libre de penser ce qu’il veut. Pour autant, ce qui m’agace, c’est que l’on a des experts qui nous expliquent qu’il faut rester chez soi. Alors pourquoi ne pas les écouter ? On peut penser que c’est un complot, que c’est débile, que c’est n’importe quoi de nous interdire d’aller rouler… Peu importe ! Les faits, c’est qu’on nous demande de le faire alors respectons les consignes. Mais bon, je ne suis pas étonné du comportement de certains. Combien de gens roulent à 160 km/h sur l’autoroute ? Une chose est sûre ; de mon côté, j’ai ma conscience pour moi.

En faisant confiance à la médecine…
J’écoute les professionnels de la santé et pas tous les pseudo-donneurs de leçon qui pensent mieux savoir que les scientifiques. Je trouve ça tellement égoïste. Mais encore une fois, dans le fond, chacun pense bien ce qu’il veut. J’espère simplement que tout ça se terminera le plus vite possible et on nous a dit quoi faire pour y parvenir.

Mots-clés

En savoir plus

Portrait de Steve CHAINEL