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Thomas Voeckler : «Le monde des médias m’attire»

thomas louapre/divergence

EN 2018, JE CHANGE DE VIE (2/5). Nouvel épisode de notre série sur ces personnalités qui donnent un nouveau tour à leur vie, avec l’ancien Maillot jaune du Tour de France.

Le 23 juillet dernier, à la fin du Tour de France sur les Champs-Élysées, Thomas Voeckler (38 ans) mettait un terme à 17 ans de carrière professionnelle. Avec 500 000 kilomètres au compteur. Depuis il a entamé une formation de manager général de club sportif professionnel. Un programme sur deux ans au Centre de droit et d’économie du sport, rattaché à l’université de Limoges. Un diplôme reconnu bac + 4 et une formation encadrée par Jean-Pierre Karaquillo, qu’avait suivie Zinédine Zidane. « Cela va me prendre un peu de temps mais me motiveénormément », résume celui qui, du côté des médias ou comme ambassadeur d’organisateurs de courses, ne manque pas de sollicitations.

LE FIGARO. - À quel moment avez-vous senti que votre vie allait changer ?

Thomas VOECKLER. - J’ai eu la chance de choisir la date et le lieu de ma fin de carrière, ce qui est déjà beaucoup. Une fois cela décidé, j’ai vite compris que je n’allais pas rester à rien faire. Je n’ai jamais caché que le monde des médias m’attire. Je devrais officier sur un petit programme de courses pour une chaîne de télévision. Mon idée, lors des deux prochaines années, c’est de toucher à différents domaines pour voir ce qui me plaît. Je sais ce que c’est qu’être coureur cycliste mais je n’ai jamais rien fait d’autre. Je ne sais pas quel métier me plairait et là où je pourrais être bon. J’ai souvent clamé que je ne voudrais pas être à la tête d’une équipe plus tard mais quand on passe un tel cap dans sa vie on ne voit plus tout à fait les choses de la même façon. Loin de moi l’idée de prétendre avoir les compétences pour faire un bon manager mais si, un jour, je devais assurer une succession ou une création d’équipe, j’aimerais avoir les clés en main pour pouvoir le faire à ma manière et pas simplement parce que j’ai été longtemps pro et que j’ai fait une carrière correcte.

Les équipes cyclistes partent en stage, prêtes à lancer la saison, ressentez-vous un manque ?

Pour l’instant, non. Ce qui m’a toujours fait avancer, c’est la compétition. La période hivernale, point de passage obligé, était pour moi la plus contraignante. Mais lorsque les compétitions vont reprendre, j’aurai sans doute un petit pincement au cœur et le goût de la « compét’ » va me manquer mais je sais tellement tout le travail qu’il y a derrière toute l’année pour se faire plaisir en compétition… J’étais arrivé au bout de mon cycle.

Je ne ferai pas un bilan dans six mois, ni dans deux ans : la reconversion, elle sera réussie dans un laps de temps aussi long que ma ­période de coureur

Thomas Voeckler

Avez-vous des angoisses au moment de plonger dans une nouvelle vie ?

Oui. Celui qui n’a aucune crainte ou qui n’appréhende pas un peu, je pense qu’il est imprudent. Professionnellement, c’est une nouvelle vie. Il faudra apprécier sur le long terme. Je ne ferai pas un bilan dans six mois, ni dans deux ans : la reconversion, elle sera réussie dans un laps de temps aussi long que ma ­période de coureur. Il me faut d’abord prendre le temps de digérer le fait de ne plus être sportif de haut niveau et dans un deuxième temps avoir un projet professionnel.

Comment votre entourage vit ces nouvelles perspectives ?

Les enfants sont ravis. Quand je suis parti quatre jours en formation, cela leur a fait tout drôle. Ils n’étaient pas trop contents. Mais pour avoir une activité, il faut que je bouge un peu. Le grand verse, de temps en temps, une larmichette quand il voit des photos, il se dit qu’il ne pourra plus supporter son papa sur le bord de la route. La deuxième qui a 6 ans, ce qui l’embête, c’est qu’on va moins aller à l’hôtel. Et la toute petite de 2 mois, elle s’en moque un peu… Mon épouse, elle, attendait cela. On a toujours voulu un troisième enfant et la condition c’était que j’arrête ma carrière. Deux enfants à plein-temps, plus un troisième, cela aurait été compliqué avec toutes les absences. Il faut aussi imaginer la vie de couple et être vigilant à ce niveau aussi. C’est un mode de vie qui change. Ce sont des paramètres dont il faut tenir compte.

En quoi la carrière passée va-t-elle vous servir ?

Elle me permettra de savoir qu’il ne faut pas baisser les bras. Qu’il ne faut pas se rabaisser non plus, parfois on croit qu’on ne va pas être compétent et on en est pourtant capable, cela m’est arrivé. Dans le monde du travail, je pense que c’est cela aussi. Et d’un autre côté, elle me permettra de savoir qu’on n’a rien sans rien. Si on croit que tout est acquis… Je prends l’exemple de consultant télé, cela va être une de mes missions l’an prochain, si je me dis que j’ai juste à arriver en disant je m’appelle Thomas Voeckler et que cela suffira : non. Les équipes évoluent, les stratégies de course évoluent, les coureurs changent d’équipe… Il faut se tenir à jour et bosser.

J’ai vécu deux départs en Vendée comme coureur, un troisième de l’autre côté de la barrière, ce sera sympa. Cela ne me fait pas regretter ma décision.

Thomas Voeckler

Le 7 juillet prochain, le Tour de France partira de Vendée, vous serez à domicile, dans un autre rôle…

Tout le monde me dit « si tu avais continué un an… », non. J’étais arrivé au bout. Un départ du Tour, en Vendée, je devrais être un peu sollicité pour officier d’une manière ou d’une autre. J’espère être à la télévision mais également en amont du Tour, pourquoi pas avec l’organisation de l’épreuve. Avec ASO (Amaury Sport Organisation, en charge du Tour de France)on discute. L’an prochain, je ne vais pas être rattaché à un organisme ou une société en exclusivité. J’ai envie de tenter deux, trois missions. J’ai vécu deux départs en Vendée comme coureur, un troisième de l’autre côté de la barrière, ce sera sympa. Cela ne me fait pas regretter ma décision.

Au micro ou en costume, défendrez-vous un cyclisme souvent en proie aux affaires ?

Le vélo, ce n’est pas que la mauvaise image. J’ai connu des années où tous les six mois de grosses affaires de dopage sortaient, ce n’est pas pour autant que le vélo n’est pas crédible. Au contraire, il a gagné en crédibilité en prenant tous ces coups. Quand un cas comme celui de Froome sort, il faut y aller très prudemment parce que ce n’est pas un cas de dopage avéré mais tous les vieux démons ressortent. J’ai bien l’intention dans mes futures fonctions de ne pas faire de cadeaux à ceux qui nous prennent pour des cons mais en même temps de mettre le vélo en avant et de rappeler ce qui a été fait par rapport à ce qui a été mis en place dans les autres sports. Même s’il faut toujours balayer devant sa porte. Et si tout n’est pas rose, comparé à il y a une quinzaine d’années, c’est quand même le jour et la nuit.

Imaginez-vous un jour votre fils prendre le relais dans le peloton ?

Je serai fier qu’il fasse du vélo mais le plus tard sera le mieux. Il n’en parle pas trop. Être « fils de », ce n’est pas toujours facile. Si dans quelques années il en a vraiment envie, ça sera avec plaisir. Il fera ce qu’il veut. Pour l’instant, il joue au tennis, au hand, mais ce serait une fierté si mon fils faisait du vélo…

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