La Grande Interview : Planning bien chargé

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Depuis plusieurs saisons, DirectVelo vous propose d’en savoir plus sur la vie des hommes qui se cachent sous le casque et derrière les lunettes de coureurs cyclistes. L’endroit où ils ont grandi et donné leurs premiers coups de pédales, leurs souvenirs d’enfance, leurs moments de grand bonheur, leurs périodes de doute, de solitude ou de souffrance, leurs passe-temps entre amis ou en famille, leurs plus grands rêves et leurs plus terribles désillusions. En plus de 140 numéros de “La Grande Interview”, ils sont nombreux à s’être confiés en largeur. En cette période des Fêtes de fin d’année, DirectVelo vous propose de revivre quelques extraits de votre rendez-vous habituel du jeudi soir.
Aujourd’hui, coup de projecteur sur des coureurs qui ont réussi à réaliser de grands résultats malgré un emploi du temps très chargé en parallèle, de par une activité professionnelle ou des études. 

Simon Sellier (Vendée U) - Entretien réalisé le 2 mars 2017 - lire ici

J'avais l'envie de marcher sur le vélo mais j'avais aussi l'école en parallèle. J'ai passé un Bac Pro Maçonnerie par apprentissage et du coup, j'ai rapidement travaillé avec ensuite un BTS de génie civil (travaux publics). Pendant ma seconde saison chez les Cadets puis ma première année Juniors, je bossais 40h par semaine. Autant dire qu'il ne me restait pas beaucoup de temps pour le vélo. Et pourtant, je faisais quand même des résultats. Surtout, je progressais beaucoup l'été, quand je ne travaillais plus à la période du Championnat de France. Je sentais que je m’améliorais vite et ça m'a toujours laissé penser qu'en me consacrant pleinement au vélo, il y avait la place pour faire quelque chose d'intéressant. Et j'ai bien senti la différence depuis puisque à partir de ma saison en Espoir 2, j'ai pu me consacrer à 100% au vélo et ça change tout.

Qu'a pu apporter le fait d'avoir travaillé 40h par semaine pendant une bonne partie de ton adolescence au coureur cycliste que tu es devenu aujourd'hui ?
Cela m'a fait réaliser beaucoup de choses, à commencer par le fait que pouvoir éventuellement vivre de sa passion est quelque chose de magnifique. Faire du vélo, ce n'est que du bonheur. J'ai aussi appris à relativiser. Parfois, ce n'est pas très marrant d'aller faire du vélo cinq ou six heures sous la pluie mais je me dis que c'est toujours mieux que d'aller à l'usine pendant huit heures. Je pense que mentalement, c'est un plus d'avoir travaillé. Et beaucoup de coureurs qui ont vécu ma situation le diront également, j'en suis sûr. Physiquement aussi, ça m'a apporté dans le sens où j'ai pu travailler des parties du corps que l'on ne travaille pas toujours sur le vélo, comme le haut du corps. Ça m'a permis d'être un grand solide (sourires).

Grégoire Tarride (AVC Aix-en-Provence) - Entretien réalisé le 20 avril 2017 - lire ici

Je n'ai pas vraiment le temps de m'ennuyer. Je suis très pris par mon métier d'ostéopathe, en plus de mon activité de coureur cycliste à l'AVC Aix-en-Provence. J'essaie de m'organiser du mieux possible entre les deux mais ce n'est pas toujours facile. Enfin, l'essentiel, c'est que je m'en sors quand même plutôt bien, il me semble. Je suis épanoui dans ma profession, j'ai ouvert mon cabinet fin 2016 et sur le vélo, tout marche bien avec notamment cette récente victoire en Coupe de France DN1.

Quel est ton emploi du temps sur une semaine type cette saison ?
Une semaine type, c'est une semaine où je ne cours que le week-end. La plupart du temps, j'essaie d'aller rouler un peu le matin, puis je travaille l'après-midi. Ca me fait quand même des grosses journées car il n'est pas rare que je quitte le cabinet à 21h30. C'est une vraie organisation à trouver mais j'y vois plein d'avantages, à commencer par celui de m'organiser quand même comme je veux.

Et quand tu pars sur les routes toute la semaine, comme récemment avec le Tour du Loir-et-Cher ?
Je suis bien entendu obligé de poser ma semaine. C'est une perte de temps de travail car ce n'est pas du temps que je peux récupérer plus tard. Financièrement, c'est forcément un petit handicap mais je m'en sors quand même. L'avantage, c'est que je suis capable d'anticiper tout ça au moins un mois à l'avance. Je sais quand je vais partir sur des courses par étapes en semaine. Du coup, je ne propose simplement pas de rendez-vous à ces dates-là. Le seul véritable problème, ce sont les urgences que je suis obligé de refuser puisqu'en déplacement. Mais les gens me connaissent, ils savent que je peux être sur des courses cyclistes et je les renvoie vers un autre collègue ostéopathe.

Adrien Guillonnet (SCO Dijon) - Entretien réalisé le 31 août 2017 - lire ici

Il parait que tu n'as jamais une minute devant toi !
(Rires). J’essaie de m’organiser au mieux. Jusqu’à présent, mes études ne me posaient pas trop de problèmes, à la Fac, même si je commençais à courir en Elites. Mais depuis que je suis à l’INSA de Lyon (école d’ingénieurs, filière génie mécanique et conception, NDLR), c’est plus compliqué mais j’ai un programme adapté malgré tout. J’arrive toujours à me trouver un créneau horaire pour sortir mon vélo. Généralement, j’aime bien rouler entre midi et deux. Cela dit, c’est vrai qu’il faut aussi compter le temps de trajet. J’étudie à Lyon et j’y suis souvent. Le reste du temps, je suis chez mes parents à Marcoussis, dans l’Essonne. Enfin… Quand j’en ai le temps, c’est à dire le week-end ou pendant des vacances. Du coup, je prends souvent le train : pour me rendre sur les courses de vélo mais aussi pour aller en cours. Cela me prend beaucoup de temps.

Tu n'as donc jamais le temps de te faire plaisir ou de te détendre ?
C’est vrai qu’entre le vélo et les études, je ne fais pas grand-chose à côté, mais ce n’est pas pour me déplaire. Je pense que de toute façon, c’est la vie réelle. Certains qui ne font que du vélo ne se rendent peut-être pas compte mais la vie de la plupart des Français, c’est celle-là, non ? Quand on rentre du travail le soir, il ne reste pas beaucoup de temps pour faire autre chose. Alors je ne vais pas me plaindre de ma situation. Ca me prépare pour le futur !

Combien de temps consacres-tu en moyenne au vélo et à tes études sur une semaine ?
J’ai 25h de cours par semaine. J’ai aussi des périodes de révisions mais j’en fais le minimum. Par chance, j’ai une bonne mémoire et le simple fait de bien suivre en cours me suffit, en général. Sur le vélo, ça varie. Je fais des semaines de 14 à 18 heures, en gros. Mais ça dépend du calendrier. C’est évidemment beaucoup plus quand il y a des courses par étapes. Mais si on compte aussi le temps à côté, dans la préparation, les analyses, les déplacements… Ca fait un bon nombre d’heures supplémentaires.

Louis Pijourlet (CR4C Roanne) - Entretien réalisé le 14 septembre 2017 - lire ici

Tu suis actuellement des études en psychologie : c'est une passion ?
Une passion, je ne sais pas, mais c’est une discipline qui m’intéresse énormément. Ce n’est pas très simple car la faculté ne m’offre aucune adaptation relative à mon calendrier de courses ou à mes entraînements. Du coup pour le moment, je galère un peu en L3. Mais je vais y arriver ! Jusqu'à présent, j’ai toujours privilégié le cyclisme quand il y avait un choix à faire, pour me laisser un maximum de chances pour la suite dans ce sport.

La psychologie tient-elle un rôle important dans ton activité de coureur cycliste ?
S'il ne s'agissait que d’obtenir un diplôme universitaire, j’aurais choisi une filière plus adaptée à mes activités sportives. Mon souhait à long terme est de pouvoir faire coïncider le cyclisme de haut-niveau et la psychologie. La psychologie du sport est encore balbutiante en France mais c’est vraiment ce métier que je vise pour ma reconversion. Aujourd’hui, le titre professionnel n’est pas encore protégé. On peut se déclarer psychologue du sport en ayant un cursus STAPS mais sans jamais avoir suivi une heure de cours de psycho. Sans doute qu’à ce niveau, les choses vont évoluer dans les années qui viennent. Mon ambition est de pousser ma formation jusqu’au titre de psychologue clinicien pour ensuite m’orienter vers un public exclusivement de sportifs de haut-niveau et si possible issu du monde cycliste. Il y a déjà des psychologues du sport au sein de certaines équipes de France ou à l’INSEP par exemple. C’est ce rôle qui m’intéresse, rôle qui va au-delà du coaching en s’intéressant surtout aux aspects cliniques.

Camille Thominet (CM Aubervilliers 93) - Entretien réalisé le 26 octobre 2017 - lire ici

Entre le travail et le cyclisme, à quoi correspondait une semaine type pour toi, ces 21 derniers mois ?
En général, je ne roule pas le lundi. Les autres jours de la semaine, je pars rouler dès que je sors du boulot. J’ai fini de travailler à 16h45 et je suis sur le vélo à 17h10 précise (sourires). Et là, je fais généralement des sorties de deux heures, deux heures trente, cinq jours par semaine. Quand j’avais besoin de faire de grosses sorties, je m’organisais pour pouvoir partir directement du boulot. Mais il m’est quand même souvent arrivé de finir mes sorties de nuit, avec mon frère et d’autres amis. Il pouvait arriver qu’on se retrouve à sept ou huit, même s’ils ne faisaient pas tous la sortie en entier avec moi.

Ce n’est pas compliqué d’enchaîner directement ta journée de travail et une longue sortie de vélo ?
Parfois, ce n’est pas évident. Mon boulot peut être physique dans le sens où je suis toujours debout, par exemple. Il faut porter pas mal de pièces dans la journée aussi, comme des moteurs par exemple. L’air de rien, ça casse physiquement. J’ai calculé la distance effectuée sur une journée de travail et je fais environ 7 kilomètres à pied. Mais bon, je ne vais pas me plaindre. Franchement, j’aime bien aller rouler même après une journée de travail. En plus, la plupart du temps, je roule avec mon frère qui bosse à l’usine lui aussi. Ca me permet de me libérer du boulot. Je ne cogite pas, je vais rouler et je suis tranquille ! La seule exception, c’est quand t’as passé une journée de merde au boulot et qu’il tombe des cordes dehors. Là, t’as pas forcément envie de rouler. Mais c’est rare que je me désiste.

Guillaume Gerbaud (UV Limoges-Team U 87) - Entretien réalisé le 7 décembre 2017 - lire ici

Tu as eu des difficultés à être accepté en tant que cycliste par le milieu médical ?
D’une certaine manière, oui. Surtout dans l’idée d’être à la fois médecin et sportif de haut-niveau. On ne pense certainement pas faisable le fait d’être cycliste pro et médecin car le niveau d’exigence pour prétendre devenir un bon médecin est tel que je ne crois pas cela possible.

Idéalement, il aurait même été souhaitable que tu ne fasses pas du tout de vélo ?
Faire d’autres activités en parallèle est sans doute encouragé, même quand c’est fait très sérieusement et que cela prend du temps. Disons que c’est une bonne manière de se ressourcer.

Et dans l’autre sens, comment tes études de médecine étaient-elles perçues au sein du peloton ?
Je n’ai jamais ressenti de rejet du milieu cycliste quant à mes études. Certes, à l’époque, lorsque j’ai débuté, moins de coureurs suivaient des études supérieures mais j’étais globalement accepté comme j’étais.

Et qu’en est-il des possibles préjugés, plus ou moins humoristiques, qui mêlent la médecine, le cyclisme et le dopage ?
Je n’ai jamais été confronté à de telles remarques même si à quelques occasions, j’ai eu vent de propos de ce genre. Notamment quand je marchais bien dans des périodes où les études ne me laissaient que peu de temps pour m’entraîner. Et puis également quand j’ai fait un peu d’encadrement et que certains de mes gars marchaient fort. Mais globalement, cela reste marginal et je n’y ai jamais réellement prêté attention.

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