Raymond, quel est votre premier souvenir du Tour de France ?
Mon premier souvenir remonte à ma jeunesse. C’était lors du passage du Tour de France à Saint Léonard de Noblat, j’avais 14-15 ans. J’étais au bord de la route à acclamer des champions comme Coppi ou Koblet.

Et votre premier souvenir en tant que coureur du Tour de France ?
C’était en 1962, pour mon premier Tour de France. Le départ était à Nancy, place Stanislas. La place a d’ailleurs bien changé depuis. C’est à la fois un bon souvenir et un mauvais souvenir. Avant le grand départ, j’ai été victime d’une fracture du petit doigt de la main gauche et j’avais un immense plâtre autour de ce doigt pendant le début de ce Tour de France. Comme je ne pouvais pas me servir de mon bras gauche, c’était compliqué. Il y avait par exemple le contrôle de ravitaillement, ce qu’on appelait la musette. C’était donc difficile pour moi de prendre correctement une musette. Ce n’était pas pareil que maintenant. A l’époque, lors des ravitaillements, c’était des attaques de partout. Les leaders étaient ravitaillés par leurs équipiers et ils ne faisaient pas le ravitaillement. Et le premier jour de ce Tour, j’ai perdu 9 minutes. Le soir, le moral était dans les chaussettes. Puis j’ai réussi à gagner une grande étape de montagne lorsqu’on m’a enlevé le plâtre, et j’ai fais 3ème de ce Tour de France. Evidemment c’est un souvenir immense.

Comment avez-vous vu évoluer le Tour de France après votre carrière ?
C’est une évolution qui a été très rapide et très importante. Mon dernier Tour était en 1976 et après j’ai fais le Tour pour la radio, la télévision, et maintenant relations publiques. C’est mon 55ème tour de France, le 17ème avec LCL qui sponsorise le maillot jaune. J’ai assisté à l’évolution du Tour de France, maintenant c’est une véritable entreprise. Avant, au Tour de France, il y avait une voiture de directeur sportif et une deuxième voiture de l’adjoint du directeur sportif. Il n’y avait pas de grand bus, et il n’y avait pas non plus tout ce ravitaillement en course, on se ravitaillait une seule fois à la mi-course.

Vous êtes présents au village départ chaque matin, où les coureurs passent souvent avant de partir. Que se passait-il avant le départ à votre époque ?
Il n’y avait pas de village, il n’y avait rien. On se changeait dans la voiture du directeur sportif devant tout le public. Tous les coureurs étaient dans une voiture, il n’y avait pas de place pour tout le monde et on était livré au public. Ce n’était pas non plus la même chose aux arrivées, à l’époque il y avait 100 mètres de barrières et ça s’arrêtait là.

Quel regard portez-vous sur ce Tour ?
Il y a eu plein de bouleversements, avec notamment des arrivées au sprint houleuses où je tremble pour les coureurs à chaque fois. Une victoire sur le Tour de France a tellement de répercussions au point de vue médiatique que tout le monde veut gagner. Les coureurs prennent d’énormes risques, et parfois c’est la chute, comme ce qui est arrivé avec l’élimination de Cavendish et l’exclusion de Peter Sagan.

Pensez-vous qu’un coureur comme Aru puisse faire vaciller Froome ?
Fabio Aru s’est positionné comme un redoutable adversaire pour Christopher Fromme, amis de là à la concurrencer c’est autre chose. Il reste encore deux semaines de Tour de France, mais on sait maintenant que Froome sera difficile à détrôner.