Pour commenter le direct de Paris Nice sur Eurosport International cette année, on retrouve rien de moins que le « King » Kelly au micro. Qui connait mieux cette épreuve que l’Irlandais lui même? Sean Kelly ce monument du cyclisme mondial et qui détient un palmarès à en faire pâlir plus d’un. Kelly, c’est l’homme de deux Paris-Roubaix, deux Milan San Remo, deux Liège-Bastogne-Liège, une Vuelta, 21 étapes de grands tours et surtout sept Paris-Nice de suite. Il est le recordman de victoires sur la « course au soleil » sûrement durant des années voire peut être pour l’éternité. Il est et reste le « King Sean Kelly » comme on le surnomme dans son Irlande natale. C’était « sa » course, son royaume. Il l’avait ravi dès 1982 à son compatriote Stephen Roche vainqueur en 1981. Les deux guerriers se sont livrés à de terribles batailles durant quelques années. Mais c’était sa course, lui qui n’était pas un grand grimpeur savait serré les dents dans les moments les plus durs pour limiter la casse quand la montagne s’élevait. Il avait cette capacité à s’adapter à toutes formes de profils, il avait cette polyvalence qui faisait justement sa force.
Son premier Paris-Nice, il le fit en 1977 avec le team Flandria du Vicomte Jean De Gribaldy avec Freddy Maertens comme leader. Dès cette première rencontre, le prince avait trouvé son royaume. Il le savait, Paris Nice devait être pour lui et personne d’autre. Il retourna auprès du Vicomte sous les couleurs de Sem France Loire en 1982, Sean Kelly remporta son premier Paris Nice cette année là. Il ne lâchera jamais ensuite le sceptre de son royaume même contre des légendaires conquérants qu’étaient Stephen Roche, Bernard Hinault, Greg Lemond, Jean-François Bernard ou Gilbert Duclos-Lassale. Il faisait rouler ses équipiers pour la victoire au général et savait aussi leur rendre la pareille comme il le fit pour Joël Pelier sur la 4ème étape en 1985. C’était le seigneur de Paris Nice. Il ne disputa pas l’édition de 1989 préférant s’aligner sur Tirreno Adriatico. Comment le « King » pouvait il se passer de Paris Nice? Il eut cette réponse des plus claires et celle d’un orgueilleux conquérant. « J’étais heureux de ne pas courir Paris-Nice, parce que je suis parti comme le vainqueur, les autres n’ont jamais eu la chance de me tomber dessus ».
Mais il ne put s’empêcher de revenir sur « sa » course en 1990 et 1991. Il ne retrouva portant jamais son trône mais il est et reste à jamais « king Sean Kelly », Monsieur Paris-Nice !
Sean, Quelle est votre victoire la plus belle sur ses 7 Paris-Nice.
Sean Kelly: « Ouch…. Tu sais, elles étaient toutes belles. Mais j’ai un faible pour la première en 1982. On se souvient toujours de sa première fois mais celle-ci avait un goût particulier. Je n’étais pas vraiment connu et surtout pas attendu un vainqueur potentiel selon les pronostics. À l’époque, c’était Gilbert Duclos-Lasalle le grand favori. J’ai remporté quatre étapes cette année-là. Ça a été une belle bagarre entre nous. Gilbert m’avait ravi le maillot de leader sur la 6ème étape. La dernière, c’était le chrono de 11 km sur les pentes du Col d’Eze et je savais que j’étais plus fort que lui sur ce genre d’exercice. Il y avait aussi Jean-Luc Vandenbroucke dont il fallait se méfier. Je remporte le chrono devant Jean-Luc et je prends le général à Gilbert. C’est ma plus belle victoire sur Paris-Nice, la première. «
La plus dure à remporter?
Sean Kelly: « Elles étaient toutes difficiles. Sur Paris-Nice, tu affrontes, en plus des cols, le climat du mois de Mars. J’aimais bien quand il y avait du vent et de la pluie, plus les conditions étaient difficiles, meilleur j’étais. Mais le plus dur a été sans nul doute contre mon compatriote Stephen Roche en 1987. Stephen était vraiment le plus fort cette année-là, celle de son triplé historique. Bref, je chute dès le début de l’épreuve et mon retard est si conséquent que toute chance de remporter le général était foutue. Mais je continue à jouer quand même les sprints avec mes équipiers. J’avais comme objectif de remporter des étapes du coup. Durant les deux dernières étapes, la chance m’est revenue. Dans l’avant-dernière étape avec une arrivée sur Nice, je suis avec Stephen dans la montée du dernier col, c’est Jean-Luc Vandenbroucke qui donne le rythme au peloton. Je souffrais comme un damné, je m’accrochais mais je voulais arriver au sommet avec le groupe de tête et basculer dans la descente pour le sprint à Nice. Mais durant cette montée au sommet, Vandenbroucke entend un « pschitt » venant du boyau de Stephen. Il arrive à ma hauteur et me dit: « Il a crevé ». Il a dû mettre pied à terre pour changer de roue avec le seul coéquipier qu’il avait. Je n’ai donné aucune consigne à Vandenbroucke car il savait quoi faire. Nous, on a continué à rouler au même rythme et Laurent Fignon remporte l’étape devant moi avec 3 sec d’avance. Stephen arrivait plus d’une minute trente de retard. J’avais le maillot de leader. L’après midi, je pensais que le contre -la-montre du Col d’Eze allait augmenter mon avance. Mais Stephen était très en colère sûrement car il a tout donné sur ce chrono et le remporta d’une seconde devant moi. Si il n’avait pas crevé au mauvais moment il aurait remporté son 2ème Paris-Nice. Moi j’ai gagné mon 6ème. »
Pour cette édition 2017, quels sont vos favoris ?
Sean Kelly: « Je ne sais pas trop… Je pense que l’on va sûrement assister à un duel Contador-Porte. Richie Porte aime cette course et il a une superbe équipe autour de lui. Contador est capable d’attaquer tout le temps, en montée, sur le plat et en descente. Tu ne peux jamais prévoir quand il va le faire mais une chose est sûre, il va y aller. Ils sont parmi mes favoris. Mais il y aussi de jeunes talents qui arrivent. Paris-Nice a toujours été un tremplin pour les jeunes coureurs que l’on ne connaît pas forcément sur ce genre de courses par étapes. Personne n’aurait misé sur moi en 1982… Beaucoup de talents qui attendent Paris-Nice avec impatience. »