De la difficulté d'être cycliste féminine : Charlotte Bravard, d'Anet "espère avoir un salaire tous les mois"

De la difficulté d'être cycliste féminine : Charlotte Bravard, d'Anet "espère avoir un salaire tous les mois"
Charlotte Bravard est licenciée au VS Chartres et fait partie de Poitou-Charentes Futuroscope 86 depuis deux ans. © photo : isabelle hervé
Charlotte Bravard ne sait pas de quoi sera fait son avenir, et songe même à arrêter le vélo. À moins que la venue de la Fdj comme sponsor dans son équipe n’améliore ses conditions de vie. L’Anetaise raconte ses difficultés.

« J'espère avoir un salaire tous les mois »

Les cyclistes de Poitou-Charentes Futuroscope 86 voient l'arrivée de la Fdj comme nouveau sponsor en 2017 d'un bon œil. Comme l'Anetaise Charlotte Bravard, licenciée au VS Chartres, vainqueur du Tour de Charente-Maritime le week-end dernier, mais qui fait partie de cette structure depuis deux ans. Même si Poitou-Charentes Futuroscope 86 est la seule équipe française évoluant au niveau professionnel, les filles ne vivent pas sur l'or. Loin de là. Charlotte Bravard, 24 ans, 8 e des championnats d'Europe espoirs il y a deux ans, 3 e à Plumelec (course UCI) la même année et vainqueur de la manche de Coupe de France à Loudun en 2015, nous explique ses conditions de vie, ses craintes et ses nouveaux espoirs.

Pourquoi avez-vous rejoint Poitou-Charentes Futuroscope 86 il y a deux ans ? Parce que c'est la seule équipe UCI française, la meilleure structure dans l'Hexagone. J'ai postulé et j'ai été prise.

Quels sont les avantages dans cette formation ? Je ne m'occupe de rien ! On me dit, t'as rendez-vous à tel endroit, à telle heure, et j'y vais. On a aussi du matériel : deux vélos de route et un vélo contre-la-montre. On se fait masser. J'ai juste besoin de pédaler.

Recevez-vous un salaire ? Aucune fille chez nous n'est salariée. On reçoit des vacations qui s'élèvent à quelques centaines d'euros par mois. Seulement cinq cyclistes sur un groupe de onze les perçoivent. Et des primes de course en fin d'année, en fonction des résultats, soit environ 5.000 euros par an.

Arrivez-vous quand-même à vivre correctement ou travaillez-vous ? Je travaille un peu pendant l'hiver, des petits boulots dans la télécommunication. Je ne trouve pas dans mon domaine. Je possède un BTS communication. C'est un peu dur, mais j'habite avec mon ami (Romain Gioux, licencié au VS Chartres) à Châteauroux. Il est chargé de communication à la préfecture de l'Indre.

Est-ce que l'arrivée de la Fdj va changer quelque chose ? On espère vraiment, mais pour l'instant, on ne sait pas ce qui va changer.

« Je ne sais pas où le vélo va me mener »

Qu'espérez-vous ? Pouvoir vivre du vélo. Car je me pose des questions : est-ce que je vais continuer ? Je calcule tous les mois ce que je dépense. Ce n'est pas une vie. Alors, avec l'arrivée de la Fdj, j'espère avoir un salaire tous les mois, et faire des stages.

Combien de temps vous prend le vélo ? 22 heures chaque semaine. Je pourrais avoir un petit boulot à côté, mais c'est compliqué. Car l'été, il y a les tours et je pars une semaine. Je ne peux pas demander à mon employeur de me laisser libre aussi longtemps. Et quand j'ai une course le samedi, je m'en vais le vendredi… Si les choses changent avec la Fdj, je continuerai, sinon, je ne sais pas où le vélo va me mener.

Y a-t-il des cyclistes françaises pros ? Seules les Françaises dans les équipes étrangères arrivent à être pros.

« Pauline Ferrand-Prévot a aidé à la médiatisation du cyclisme féminin »

La différence de salaire entre les hommes cyclistes et les femmes ne vous agace-t-elle pas ? Non, et puis, les choses évoluent. Les spectateurs qui viennent nous voir sont impressionnés par notre niveau. Ils ne pensaient pas que les filles pouvaient rouler aussi vite.

Mais on vous voit peu à la télé… Ça vient ; ça se développe depuis deux ou trois ans. Et dans les journaux, on a de plus en plus d'articles. Pauline Ferrand-Prévot (championne du monde sur route 2014, championne du monde de VTT et de cyclo-cross en 2015) a aidé à cette médiatisation.

Isabelle Hervé


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