Miguel Martinez : « Le cœur encore jeune »

De retour en France depuis octobre 2015, Miguel Martinez a "pris beaucoup de plaisir" a disputer la saison de cyclo-cross. Bilan pour l'ancien Champion du Monde Espoirs : quatre victoires sur des épreuves nationales, une 25e place au Championnat de France, et une participation en Coupe du Monde à Lignières (32e) le jour de ses quarante ans. "Je me sens le cœur encore jeune. C'est comme si je n'avais pas envie de vieillir", rapporte le champion olympique de Sydney en VTT à DirectVelo.
 
DirectVelo : Avec le recul, que penses-tu de ton hiver ?
Miguel Martinez : Que du positif. J'ai pris énormément de plaisir à faire du cyclo-cross, et les sensations étaient bonnes. J'ai l'impression que le beau temps a joué. J'ai peu à peu retrouvé confiance en mes capacités malgré mon âge. Ça prouve qu'avec un bon entourage et un bon encadrement, on peut toujours faire une bonne saison. Ce qui est étonnant, c'est que le cross est une discipline contraignante, qui demande des efforts violents. Et pourtant j'ai trouvé ça de plus en plus facile au fil de l'hiver. 
 
Qu'en retiens-tu ?
En bien, ma première manche de Coupe de France à Quelneuc. Sans les soucis que j'ai connus (lire ici), je pense que j'aurai fini sur le podium. La Coupe du Monde à Lignières-en-Berry, où j'ai fini 32e en partant 60e, restera également un très bon souvenir. C'était un magnifique cadeau le jour de mon anniversaire. Mon pire souvenir ? Sans aucun conteste, le Championnat de France où j'ai fini en hypothermie. Pendant les deux derniers tours, j'ai tenu au mental. Je tanguais sur le vélo, je n'arrivais plus à desserrer les dents, c'était horrible. Je n'avais jamais connu ça de ma vie. Après l'arrivée, on m'a emmitouflé dans trois couvertures et cinq minutes plus tard, je tombais dans les pommes...
 
TOUTES LES COUPES DU MONDE DE VTT AU PROGRAMME
 
Vas-tu refaire du cyclo-cross l'année prochaine ?
J'y compte bien ! A la différence que cette fois, j'anticiperai la saison. Je commencerai à m'entraîner à partir du mois d'octobre histoire de pouvoir être en forme sur les manches de la Coupe de France. Comme je cours moins qu'avant en VTT, j'aurai plus de temps pour préparer l'hiver.
 
Justement, qu'en est-il du VTT ?
Je cours moins, mais je continue. Je vais participer à toutes les manches de Coupe du Monde cette année. Comme je me situe autour de la centième place mondiale, il faudra faire comme j'en ai l'habitude : remonter puis tenir. Je souhaitais à l'origine me qualifier pour les Jeux de Rio mais ça me paraît impossible. Le niveau global est très élevé et je sens que j'ai baissé d'un cran. Même si j'étais troisième Français, je pense que je ne serais pas sélectionné. Après on peut toujours rêver, peut-être que le cyclo-cross m'a mieux préparé que ce que j'imagine.
 
« INCAPABLE DE ROULER TRANQUILLE »
 
On te sent encore vert...
C'est comme si je n'avais pas envie de vieillir, je me sens le cœur encore jeune ! J'ai besoin de continuer à faire du vélo. On dit souvent qu'avec l'âge on gagne en endurance et on perd en puissance. Pourtant, je suis incapable de partir pendant trois-quatre heures et de rouler tranquille. Je pars toujours à fond. Je roule à 40 à l'heure, je fais des sprints, et au bout d'une heure et demie, deux heures j'ai terminé. Je ne me vois pas encore en jogging, avec la moustache et le chronomètre (rires).
 
Tu ne penses donc pas à raccrocher ?
Pas tout de suite, même si ça peut très vite arriver car j'ai un peu moins "faim" qu'avant. Et puis, je suis autant coureur que manager. Je gère ma structure, le Team Tropix, et ça me demande du temps. Si tout fonctionne bien, j'aurai plus de responsabilités à l'avenir. Cela implique que je deviendrai davantage manager que coureur.
 
ENTRAINEUR AUX JEUX DE RIO ?
 
Peux-tu nous parler de ton rôle de manager ?
Dans un premier temps, je me suis occupé de Juniors et d'Espoirs du cyclo-cross, mais à la demande des sponsors nous avons changé d'organisation. En tant que coureur, j'ai eu pour mission d'obtenir des résultats et de médiatiser l'équipe, ce qui a bien fonctionné puisque je suis devenu très populaire en Chine. Comme nos performances n'étaient pas suffisantes, il a fallu recruter un coureur de niveau mondial. Actuellement nous sommes donc trois dans l'effectif : Sun Xianlongo, David Rosa (Champion du Portugal de VTT, et 10e mondial) et moi-même. A la longue, j'ai dans l'idée de développer quelque chose de solide avec Dominique Pézard. On aimerait monter une grosse équipe à l'image du CSM Persan - BIC.
 
Tu travailles en Chine ?
Oui car le sponsor principal de mon équipe, Tropix, est une marque de vélos chinois. Je m'occupe de Sun Xianlongo, un des meilleurs vététistes du pays. C'est un jeune coureur qui est en lice pour les prochains Jeux Olympiques. Il est en balance avec un autre garçon et comme la Chine n'a qu'une place, ça se jouera entre les deux. Je m'occupe uniquement de l'aspect technique et mental, pas de sa préparation physique. Je l'accompagne sur chaque manche de la Coupe de Chine. Il lui faudra trois victoires pour être sélectionné. Si c'est le cas, je serai officiellement nommé entraîneur à Rio.
 
Comment juges-tu ta collaboration avec Sun Xianlongo ?
C'était très délicat au début. Il a fallu que j'arrive à intellectualiser tout ce que je faisais mécaniquement sur le vélo pour le lui expliquer avec des mots. J'ai été surpris par la difficulté de la tâche, c'était devenu tellement automatique pour moi. J'ai même découvert des choses que j'ignorais (rires). La palette est très large : mental, physique, entourage, matériel, alimentation, et même spiritualité... Être un coureur de haut niveau demande des efforts 24 heures sur 24. Au fur et à mesure, j'ai commencé à savoir comment agir avec lui et je suis devenu moins stressé. J'avais gardé en moi l'apprentissage d'Yvon Vauchez, et mon tour est venu de transmettre tout ce que je sais. Il est primordial de s'adapter à la personne qui est en face de soi pour lui prodiguer de bons conseils. Il faut apprendre à la connaître en profondeur, savoir lire dans son regard, quel est son tempérament, son savoir-faire... Personnellement, j'adore ça. Nous faisons chambre commune, nous déjeunons ensemble. C'est devenu comme un frère pour moi et c'est une bonne chose : plus la relation entre deux personnes est forte, et plus il est facile pour elles de se comprendre. Il suffit alors de quelques mots bien choisis pour changer la donne. En course, cela permet d'avoir un temps d'avance.

Crédit photo : Gwen Garot - www.photosdegwen.fr
 

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