Amaël, comment le Normand que vous êtes a vécu la présentation du Tour de France 2016 qui s’élancera de la Manche ?
Pour le département de la Manche, ça va être quelque chose de grandiose. Le départ sera compliqué. J’aime à dire qu’il n’y a pas de plat en Normandie. Ce sera forcément quelque chose de costaud au début. La ferveur populaire restera dans les mémoires. Le fait d’avoir quelques coureurs manchois dans le peloton professionnel a aussi dû beaucoup jouer dans la volonté d’accueillir le Grand Départ du Tour de France.

Est-ce une source de motivation supplémentaire après avoir manqué le Tour de France cette année ?
Complètement ! J’y pense depuis que le Grand Départ dans la Manche est officiel. Je veux vraiment être au départ de ce Tour de France. Ce sont des routes que j’ai pu parcourir depuis mon plus jeune âge. Ça aura une saveur particulière. L’impression d’être chez soi, ça doit décupler la motivation et ce sera un frisson supplémentaire. Le Tour s’annonce montagneux. L’année dernière, c’était différent avec un départ aux Pays-Bas. Avec toute la montagne qu’il y aura, c’est un Tour de France qui peut vraiment répondre à mes capacités.

Cette connaissance du terrain lors de ce Grand Départ pourra être un atout pour votre équipe.
Oui, sur les premières étapes, avec toutes les chutes qu’il peut y avoir, ça peut être un atout important dans l’équipe où on sera présent pour faire un podium. Il faudra aussi être performant physiquement. La connaissance du terrain ne suffira pas. A 33 ans, je sais comment me préparer pour les Grands Tours. Cette année a été différente puisque j’ai participé au Giro et à la Vuelta. Mon approche sera la même que d’habitude.

Comment décririez-vous ces premières étapes ?
Piégeuses et dures. La Manche, c’est toujours casse-pattes. Il y aura beaucoup de dénivelé. Il peut y avoir un peu de vent, mais on reste en juillet et on devrait être pas mal protégé sur la fin des étapes. Ce seront, quoi qu’il arrive, deux étapes de costauds.

En particulier la 2ème entre Saint-Lô et Cherbourg qui se termine par la montée de la Glacerie. Comment la décririez-vous ?
C’est plutôt roulant au départ avant que ça ne se corse vraiment sur le milieu de la montée. La fin est pratiquement plate. La différence sera faite dans le passage le plus dur. La première partie permettra d’allonger le peloton. La deuxième permettra de faire la différence entre les hommes forts. Ceux qui se dégageront dans les passages les plus durs pourront se disputer la victoire un kilomètre plus loin.

A quel coureur est-elle destinée ?
J’en discutais avec Philippe Gilbert il y a quelques jours et je lui disais que cette montée lui convenait parfaitement. Il y a un passage difficile. Mais les 1000 derniers mètres sont plutôt plats. La configuration est proche du Cauberg sur l’Amstel Gold Race. Elle peut lui correspondre parfaitement. Mais il y a de plus en plus de concurrence dans ce domaine avec des coureurs comme Michal Kwiatkowski, ou Peter Sagan. Je mettrai toutefois une petite pièce sur Philippe.

Cette étape doit-elle être reconnue par vos leaders ?
On doit encore en parler avec le staff. Je pense qu’ils attendaient de voir l’intégralité du parcours pour voir quelles étapes méritaient d’être reconnues. Il y a énormément d’étapes vallonnées, énormément de cols inédits. Je pense que l’accent sera mis sur la montagne. Bien évidemment, s’ils veulent venir reconnaître, je les accueillerai. Avec les moyens technologiques d’aujourd’hui, je peux également filmer en caméra embarquée.

Plus globalement, que retenez-vous de ce tracé ?
Il y a beaucoup de montées inédites, dans les Alpes notamment. Il y a aussi beaucoup moins de plaine. Le parcours se durcit très rapidement, au bout de cinq jours. Les positions au général seront tenues très rapidement. Il devrait y avoir pas mal de mouvements dans cette course et quelques changements. Les deux contre-la-montre arrivent en deuxième partie de Tour. Rien ne sera vraiment figé avant les quatre derniers jours.

Que vous inspire le retour du contre-la-montre en côte entre Sallanches et Megève ?
C’est clairement pour les grimpeurs. C’est bien de leur faire la part belle. C’est aussi un chrono qui peut permettre aux Français, Thibaut Pinot, Romain Bardet, Warren Barguil notamment, de se concentrer sur le classement général et de faire mieux que des victoires d’étape.

Comme vous le disiez, vous n’étiez pas au départ du Tour cette année. La déception est-elle passée ?
Oui. C’était une année particulière. Nous avons connu pas mal de chutes dans l’équipe. J’ai participé au Giro où j’ai pu briller. Ça a été un élément qui a montré que j’étais encore présent sur l’avant de la scène sur les grandes courses. J’ai bien terminé, ça prouve aussi que je peux être un élément important pour une équipe.

Cette 15ème place finale est d’autant plus parlante que vous avez été appelé en renfort en toute dernière minute.
Oui, je me suis senti en forme. Une place au général ne faisait pas partie de mes objectifs. Je me suis pris au jeu. Je voulais essayer de gagner une étape ou de porter le maillot rose. J’ai essayé avec au final une belle 15ème place. C’était l’un des grands moments de cette année sportive.

Vous aurez un nouveau leader à épauler l’an prochain en la personne de Richie Porte. Comment appréhendez-vous cette nouvelle situation ?
Richie aura un rôle de leader ou de co-leader pour le Tour de France. Il peut apporter beaucoup à l’équipe. Peut-être même de la sérénité pour Tejay Van Garderen. Il y aura certainement plusieurs cartes à jouer pour l’équipe BMC Racing Team sur pas mal de courses. Richie vit à Monaco donc je le connais bien depuis un moment et nous nous apprécions.

Propos recueillis à Paris le 20 octobre 2015.