Laura, tu effectues des études de kiné qui touchent à leur fin. Est-ce compliqué de mener de front de telles études et une carrière de haut-niveau ?
Cela fait six ans que j’ai eu mon Bac S, j’ai effectué un an de prépa kiné à l’issue de celui-ci avec 32 heures de cours par semaine. Ensuite je suis rentrée à l’école nationale de kinésithérapie de Saint-Maurice, dans le Val de Marne, où j’ai pu bénéficier d’un aménagement horaire (un an en deux ans) pour ma première et ma deuxième année. Heureusement que cela a été possible sinon je n’aurais pas pu continuer le sport de haut niveau. Même avec un aménagement de l’année scolaire c’est très compliqué. L’emploi du temps n’est jamais le même de semaine en semaine, il faut donc s’organiser un maximum. Lors des stages, je fais les 35 heures, je suis donc contrainte d’aller m’entraîner le soir entre 18h00 et 20h00 après une journée debout à piétiner. Ma troisième année touche à sa fin, je l’ai faite en un an parce que je voulais en finir ! De plus la dernière année est importante avec le mémoire, je préférais ainsi la faire en un an pour être dans le bain. Mais cette année fut très stressante entre les cours terminant parfois à 20h00, les exams, les stages et le mémoire. J’ai appris en début de semaine que j’avais validé cette dernière année, il ne me reste plus que le diplôme d’Etat courant juin, qui consiste en la soutenance de mon mémoire.

L’échéance nationale du mois de juillet t’a souri à plusieurs reprises. On imagine que tu vas bien préparer celle de juillet 2011 ?
En effet, en juillet, je suis performante parce que je suis en vacances, les cours étant terminés. J’ai plus de temps pour m’entraîner, plus de récupération et cela joue énormément. Pour cet été j’espère effectivement être prête pour les manches de Coupe du Monde début juillet et le Championnat de France.

L’effectif du Team BH compte de jeunes talents dont ta coéquipière Julie Bresset qui éclate à l’échelon mondial. Comment perçois-tu son évolution ?
Julie me surprend de course en course. Selon moi, elle a un don. Elle me semble toujours facile ! Elle est en constante progression. J’espère que ça va durer et qu’elle va continuer à nous faire vibrer.

Qu’est-ce que cela t’apporte de la côtoyer ?
Julie, c’est une fille agréable, humble. Elle m’apporte des choses comme je lui en apporte d’autres. Que ce soit avec moi ou Hélène Marcouyre, nous parlons de tout et de n’importe quoi. On rigole bien, on s’entend bien et pour moi c’est essentiel à la bonne réussite de nous trois.

Le monde du VTT annonce à Julie Bresset une belle carrière, même si elle n’en a pas conscience. Comment perçois-tu cette situation en tant que coéquipière ?
Oui, pour Julie chaque course est différente. Elle vit chaque beau résultat à cet instant T car elle n’est pas certaine de le réitérer. Elle manque un peu de confiance en elle, mais cela peut se concevoir, elle est arrivée au plus haut niveau en si peu de temps, il faut qu’elle s’adapte à cette nouvelle image.

Ta coéquipière Caroline Mani est partie aux Etats-Unis pour ses études. As-tu des news d’elle ?
J’ai très peu de nouvelles de Caro. D’après un réseau social, tout à l’air de bien se passer pour elle. Concernant le sport, je ne sais pas trop où elle en est, je crois qu’elle roule pour le plaisir.

Les parcours de cross-country deviennent de plus en plus techniques mais la durée de course est de plus en plus courte. Qu’en penses-tu ?
Pour nous les filles, la durée de course n’a pas tant varié. Cependant, les courses sont beaucoup plus rapides, il faut être dans le bain dès le début et aller à fond tout au long de la course. Le moindre « coup de barre » en Coupe du Monde se paie cash ! Le fait qu’ils soient plus techniques me convient. Je préfère ça aux parcours trop roulants !

En cette année préolympique, quels sont tes objectifs nationaux et internationaux ?
Comme je l’ai dit précédemment, cette année est une année-phare pour moi en ce qui concerne les études, puisque je termine mon cursus. L’hiver a donc été compliqué pour m’entraîner correctement, de même que mon début de saison, perturbé par les stages et les exams. J’espère retrouver un bon niveau cet été, des Tops 20 en Coupe du Monde, ce serait l’idéal.

As-tu les JO de Londres dans un coin de la tête ?
Oui bien sûr, je ne vais pas mentir. Actuellement je sais que je n’ai pas le niveau pour y être, mais normal vu mon emploi du temps. L’an prochain je rentre dans la vie active. Je vais travailler à mi-temps, je vais être stable et ne plus naviguer entre Paris pour les études et mon domicile. Les entraînements seront plus faciles à gérer et j’aurai du temps pour récupérer. Jusqu’alors je ne pouvais pas être à 100 % dans le vélo. On remarque le contraste entre mes débuts de saison toujours difficiles à cause des cours et un été souvent meilleur puisque je bénéficie davantage de temps et de récup. Je veux montrer que je suis capable de réaliser de bonnes performances quand j’ai tous les atouts de mon côté.

Ton diplôme te prédispose à pratiquer auprès de sportifs. Envisages-tu de travailler dans le monde du vélo ?
Pour le moment non, mais pourquoi pas dans quelques années. Le métier de masseur-kinésithérapeute est très varié. Pour l’instant je préfère toucher à tout (neuro, traumato, pédia…) afin de continuer à me former car quand on sort de l’école, nous avons encore beaucoup de choses à apprendre !

Quel regard portes-tu sur le niveau féminin français ?
Le niveau féminin français, c’est facile : il y a Julie Bresset et les autres ! Je pense que le niveau français est meilleur, il est sur la bonne dynamique. Quant aux jeunes catégories, elles ont la chance de pouvoir participer à des manches de Coupes du Monde dès la catégorie Juniors. A mon époque ce n’était pas trop le cas. J’ai dû faire une manche de Coupe du Monde en J1 et une en J2 puis arrivée en Espoirs, je n’ai couru à l’international qu’à partir de ma troisième année Espoirs, c’est donc plus difficile de s’adapter au niveau. Il faut du temps. Je pense que plus l’on court tôt à l’international, plus la dynamique sera bonne chez les Elites.

Tu évolues à un niveau proche du Top 20 en Coupe du Monde. Que te manque-t-il pour progresser encore plus dans la hiérarchie ?
Il me manque du temps, plus de récupération. Je suis loin d’être à 100%, loin de là !

Ton team, BH-Suntour-Peisey Vallandry, est réputé pour son coté familial, convivial et pro en même temps. Comment t’y sens-tu ?
Je m’y sens très bien. L’ambiance est très bonne, personne ne se prend la tête, on rigole bien entre coureurs mais aussi avec les mécanos et le kiné. Michel m’apporte de la confiance, il est présent que ça aille ou que ça n’aille pas et ça c’est essentiel. Il sait ce que je suis capable de faire, il connaît mes contraintes, il est à l’écoute et c’est très important pour moi. J’en profite pour remercier l’encadrement car la bonne réussite de l’équipe, c’est aussi grâce à eux. Sans ces derniers, il serait difficile de se gérer sur les courses !

Propos recueillis par Jean-Baptiste Trauchessec le 23 mai 2011.