«Milan-Sanremo est une des classiques qui me font le plus rêver»
Avec les fêtes de fin d'année, Philippe Gilbert s'octroie deux derniers écarts dans une préparation que le coureur de Remouchamps conduit, comme toujours, avec sérieux. Dans cinq semaines, le jeune Liégeois, 23 ans depuis juillet, va entamer sa quatrième saison chez les professionnels à l'occasion du Grand Prix d'Ouverture, dans le sud de la France.
- Publié le 25-12-2005 à 00h00
Avec les fêtes de fin d'année, Philippe Gilbert s'octroie deux derniers écarts dans une préparation que le coureur de Remouchamps conduit, comme toujours, avec sérieux.
Dans cinq semaines, le jeune Liégeois, 23 ans depuis juillet, va entamer sa quatrième saison chez les professionnels à l'occasion du Grand Prix d'Ouverture, dans le sud de la France. Depuis bientôt deux mois, le coureur de La Française des Jeux a, en effet, repris le collier. Comme l'entourage du Wallon, bon nombre d'observateurs prophétisent que la saison 2006 va être celle de l'explosion de Philippe Gilbert au plus haut niveau. «Philippe va gagner entre sept et dix courses dont une très grande», pronostique Marc Madiot, le patron de son équipe.
Après tout, il y a moins de deux ans (l'écart d'âge qui existe entre les deux hommes), Tom Boonen n'avait encore rien gagné ou presque, ce qui n'est pas le cas de Philippe Gilbert, d'ores et déjà catalogué com- me une valeur sûre du peloton et l'un des plus grands espoirs du cyclisme belge.
Comment s'est passé votre hiver?
«Bien, très bien même. J'ai coupé trois semaines, après le Chrono des Herbiers. Depuis que je suis pro, c'est la première fois que j'arrêtais si longtemps. J'en avais besoin, j'ai dû plus puiser dans mes réserves cette année comme l'avait montré mon coup de fatigue en avril. Et puis, il y a eu aussi mes débuts au Tour. Dans un grand tour, on accumule la fatigue et puis, j'avais commis une erreur. J'étais arrivé fatigué au départ en Vendée.»
Pour quelle raison?
«En juin, nous avions fait un stage d'une dizaine de jours à l'Alpe- d'Huez, puis j'avais enchaîné avec le Dauphiné. Ça a laissé des traces. Avant le prologue du Tour, les résultats de mes prises de sang étaient déjà moyens et j'ai fini le Tour mort, je me suis fait du tort. J'avais 36 d'hématocrite à Paris. Avec ça, on vous empêche d'aller travailler mais, comme c'était le Tour, j'ai voulu finir.»
Pourtant, vous avez fini 5e d'une des dernières étapes et vous avez provoqué un beau tollé en attaquant le dernier jour avant l'arrivée sur les Champs-Élysées.
«Tout cela, je l'ai fait au caractère. Pour en revenir à ce dernier jour, je reste persuadé que la course était lancée et quand les Discovery sont tombés à cause de la pluie, je me suis relevé. J'aurais pu continuer. Évidemment, si Armstrong était tombé et s'était cassé la clavicule sur ce coup-là, je serais rentré dans l'histoire (il rigole)... Eux, ils ne m'ont rien dit mais je me suis fait eng... par Lombardi. Je lui ai répondu ce que je pensais. Il me disait que je manquais de respect mais je ne comprends pas pourquoi. A ce compte-là, on peut dire aussi que Vinokourov a volé la victoire aux sprinters, puisque cette étape se termine généralement au sprint, et le lui reprocher...»
Après le Tour, vous avez dit aussi que vous n'y réaliseriez jamais un classement.
«Si je m'y prépare, je peux y obtenir un petit classement mais pas un podium, je dois être réaliste.»
A quoi, durant la morte saison, Philippe Gilbert passe-t-il son temps?
«En hiver, il faut faire ce que l'on ne peut pas faire pendant la saison: aller au restaurant, au cinéma. Mais même si je n'étais pas sportif, je ne sortirais pas tout le temps, loin de là. Je suis sorti quand même quelques fois avec des copains, j'ai joué au foot, participé à trois traques. C'est bien, on est au contact de la nature, ce que j'adore, pendant une journée entière, on marche 6 heures dans la forêt, c'est un bel effort physique. Et puis, dès le 8 novembre, j'étais sur le vélo. Ces derniers temps, il n'a pas toujours fait très beau mais dans l'ensemble, cela a été. J'ai pu m'entraîner normalement. Et quand il a vraiment fait mauvais, j'ai fait du ski de fond ou du rouleau.»
Il y a sûrement aussi des choses à faire à la maison.
«Oui, nous avons 4 hectares de terrain, on y a mis des moutons mais il reste une énorme pelouse. En été, c'est moi qui la tonds. Nous avons aussi des oies, des canards, des poules. J'ai l'habitude de m'en occuper, de leur donner à manger, même pendant la saison.»
Vous pêchez aussi...
«Plus beaucoup. En été, j'ai été voir des concours chez nous, dans l'Amblève, mais moi, ça fait un an que je n'ai plus sorti la canne à pêche.»
Les autres hivers, vous rouliez des cyclo-cross, cette fois, vous n'en ferez que deux.
«Oui, ce mercredi à Loenhout et, sans doute, le National à Tervueren, le 8 janvier. Le cyclo-cross, c'est bien mais ça vous coûte toute une journée pour un effort intensif d'une heure.»
Vous revenez d'un premier stage avec votre équipe, comment cela s'est-il passé?
«Très bien, les conditions étaient bonnes et on a pu rouler comme prévu. Je me suis rendu compte qu'en ayant moins travaillé, j'étais mieux encore que les années précédentes. Fin novembre, j'avais déjà passé un test à l'effort pour voir où j'en étais exactement, et j'ai pu constater que j'avais franchi un palier. Je poussais 30 watts de plus en étant moins entraîné. Ça fait du bien moralement.»
Pourquoi avoir moins travaillé?
«Tout simplement parce que je veux arriver moins vite en forme. L'an passé, j'étais au maximum de ma condition à Milan-Sanremo mais après, j'ai baissé petit à petit pendant les classiques.»
Et pourtant, Milan-Sanremo est votre premier grand objectif?
«En effet. Pour le moment, c'est la classique qui me convient sans doute le mieux et c'est une de celles qui me font le plus rêver. Je vais tout faire pour la gagner dès cette année. C'est pour cela que j'irai à Tirreno plutôt qu'à Paris-Nice notamment. Mais, à 300km près, j'aurai le même kilométrage dans les jambes que l'an passé. Mon problème, c'est que je n'ai pas besoin de travailler six mois comme Ullrich pour arriver en forme. Après quelques jours, ça va déjà. Et maintenant, j'ai vraiment hâte que cela recommence...»
par Eric de Falleur
© Les Sports 2005