Sven Nys: "J'ai déjà gagné, je veux le refaire"
- Publié le 31-01-2009 à 09h35
Rarement le Brabançon aura abordé un Mondial avec autant de forme, de confiance, de sérénité
Envoyé spécial aux Pays-Bas Eric de Falleur
HOOGERHEIDE Il y a un bon mois, pour la première fois dans l'histoire du sport belge, un cyclo-crossman était désigné Sportif de l'Année. Là où avaient échoué Erik De Vlaeminck, qui régna sur la discipline dans les années soixante et reste avec sept titres mondiaux le spécialiste le plus titré, ou Roland Liboton, quatre fois couronné chez les pros, Sven Nys, 32 ans depuis juin dernier, obtenait enfin la reconnaissance après laquelle il courait depuis quelques années.
Le Brabançon, auquel la 9e place conquise lors de l'épreuve olympique de VTT, à Pékin, a fait autant de bien, si pas plus, pour son crédit, dispute demain son 17e Championnat du Monde consécutif. Consacré chez les espoirs à Munich et Middelfarth, en 1997 et 98, le Brabançon, qui domine, parfois outrageusement, son sport depuis une décennie, n'a pourtant remporté qu'une seule fois le maillot arc-en-ciel : à Sankt-Wendel, il y a quatre ans.
À la veille d'une nouvelle tentative, demain, sur le tracé gelé d'Hoogerheide, en Brabant hollandais, nous avons rencontré le Cannibale de Baal.
Il y a douze mois, quasi jour pour jour, ici même à Hoogerheide, vous veniez de passer au travers de la manche de Coupe du Monde, une semaine avant le mondial de Trévise. Quelle différence, un an plus tard !
"En effet, l'année dernière, j'avais complètement raté les deux épreuves avant le Mondial. J'étais dans le trente-sixième dessous les jours précédant le Championnat du Monde et finalement, j'avais conquis la médaille de bronze. Cette fois, je me sens nettement mieux, je peux dire que je suis prêt, physiquement et mentalement. Cela ne veut pas dire que le résultat sera meilleur."
D'autant que le parcours n'est pas idéal. Du moins pour vous !
"Ce sont surtout les conditions climatiques qui changent la donne. Le gel et le refroidissement ont rendu le circuit beaucoup moins dur, d'autant qu'il n'est pas très technique. La course va être plus rapide, donc moins difficile. Il faudra être moins puissant. Cela veut dire que dix ou quinze coureurs peuvent gagner au lieu que les plus forts émergent si, comme ce fut deux ou trois fois le cas ici les années passées (NdlR : Hoogerheide a accueilli cinq fois une manche de la Coupe du Monde), le tracé est boueux et lourd. Plus de candidats au succès, cela veut dire aussi plus de nervosité, plus de danger, plus de risques, car chacun bataille pour garder sa place devant..."
Tout cela ne vous avantage pas.
"Pas spécialement, j'aurais nettement préféré une course dure, un combat d'hommes, comme ce fut le cas, il y a quinze jours à Roubaix, à cause de la boue. Mais c'est pour tout le monde la même situation, ce n'est pas une excuse."
L'intensité d'un Mondial finit par user les organismes.
"Je l'espère. À nous, les Belges, de rendre la course dure. On peut dire ce que l'on veut, mais un Championnat du Monde, c'est une course spéciale. Il va y avoir tous ces spectateurs (NdlR : on attend 50.000 spectateurs dimanche, dont 30.000 Belges), la tension sera à son comble, le rythme cardiaque exacerbé..."
Vous arrivez donc en forme au meilleur moment.
"J'avais peur, en début de saison, surtout après tous les efforts consentis pour le VTT avant et pendant les Jeux de Pékin, de finir émoussé. C'est tout le contraire qui s'est produit, notamment parce que nous avons bien géré les choses avec mon entourage. Je suis plus frais et plus serein. Mon succès au Sportif de l'Année, mon titre national, tout cela, m'a donné de la confiance et permis de préparer idéalement ce rendez-vous. Ma saison ne dépend pas de ce Mondial. J'ai gagné une fois, mais, c'est sûr, j'aimerais le refaire encore."
En tête de tous les challenges, vous venez de remporter la Coupe du Monde pour la 7e fois !
"J'en suis fier, c'est la preuve de ma régularité au plus haut niveau. Le Championnat du Monde, ce n'est qu'un jour; et depuis dix ans, j'ai pu me rendre compte qu'on peut faire tous les pronostics et imaginer que cela se passera comme ceci ou cela, il y a toujours quelque chose qui se produit et réduit à néant les prévisions."
L'ensemble de l'équipe belge semble plus détendu et soudé.
"Je ne demande pas à être le leader unique. Depuis des semaines, on essaie de faire passer le message de la cohésion. C'est normal que chacun joue sa chance en début de course, mais sur la fin, et je n'hésiterai pas à le faire si je suis dans ce cas, celui qui constate qu'il ne peut pas gagner, qu'il est un rien moins fort, doit se mettre au service d'un autre. C'est ce qui s'est passé à Sankt-Wandel, lorsque je suis devenu champion. Sven Vanthourenhout, qui était mon partenaire chez Rabobank, a couru derrière moi pendant la moitié de l'épreuve car il croyait en ses propres chances, mais sur la fin, c'est lui qui m'a aidé (NdlR : en fermant la porte à Vervecken quand Nys démarrait)."
Il faudrait des oreillettes pour ne pas vous courir dans les pieds.
"C'est interdit en cyclo-cross."
Boom est le tenant, vous venez de le battre, dimanche à Milan.
"C'est venu au bon moment, d'autant que c'était la première fois que je le battais au sprint."
Comment jugez-vous vos adversaires ?
"Rien de ce que Lars n'a réussi ces derniers temps ne m'a impressionné, mais il reste LE candidat. Cela dit, j'ai été souvent le grand favori et je n'ai gagné qu'une fois ! Stybar sera là, aussi. Mais je me concentre sur ma course. Je suis Sven Nys, payé pour gagner. Le reste ne me préoccupe pas."
© La Dernière Heure 2009