INTERVIEW« Les chutes font partie du métier », estime Ignatas Konovalovas

Tour de France : « C’est dangereux mais les chutes font partie du métier », estime Ignatas Konovalovas

INTERVIEWGravement touché dans une chute massive lors de la première étape du Tour de France, le coureur lituanien de la formation Groupama-FDJ vient tout juste de reprendre la compétition
Après sa lourde chute sur le Tour de France, Ignatas Konovalovas a repris la compétition le 1er octobre sur la Route Adélie à Vitré.
Après sa lourde chute sur le Tour de France, Ignatas Konovalovas a repris la compétition le 1er octobre sur la Route Adélie à Vitré. - Equipe cycliste Groupama-FDJ / 20 Minutes
Jérôme Gicquel

Propos recueillis par Jérôme Gicquel

L'essentiel

  • Poisson-pilote d’Arnaud Démare au sein de la formation Groupama-FDJ, le Lituanien Ignatas Konovalovas a été impliqué dans une chute massive lors de la première étape du Tour de France.
  • Hospitalisé pendant onze jours, il vient tout juste de reprendre la compétition.
  • S’il assure que les courses sont plus dangereuses aujourd’hui, il estime toutefois que les chutes font partie du métier.

Si le suspense a vite été plié avec l’écrasante domination de Pogacar, le Tour de France aura tout de même offert un beau spectacle cette année avec un rythme infernal et des conditions parfois dantesques. Le départ en Bretagne avait d’ailleurs donné le tempo avec trois premières étapes assez dingues. On retiendra bien sûr les master class d’Alaphilippe et de Van der Poel aux sommets de la Fosse aux Loups et de Mûr-de-Bretagne. Mais l’escapade bretonne a aussi été marquée par des chutes à gogo dans le peloton.

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Dès la première étape, une bonne partie des coureurs s’était ainsi retrouvée au sol à cause d’une spectatrice imprudente, la fameuse « Opi Omi » qui sera jugée ce jeudi après-midi à Brest. A quelques kilomètres de l’arrivée, une nouvelle grosse chute s’était produite, faisant encore s’allonger la liste des estropiés. Gravement touché, le coureur lituanien de la Groupama-FDJ Ignatas Konovalovas avait été contraint à l’abandon. Deux semaines après son retour à la compétition, le poisson-pilote d’Arnaud Démare revient pour 20 Minutes sur ce terrible accident et donne son avis sur la dangerosité grandissante des courses cyclistes.

Quel souvenir gardez-vous de cette chute ?

Alors pour être franc, je ne m’en souviens pas et je pense que ce n’est pas plus mal ainsi. J’ai des souvenirs des deux ou trois kilomètres avant la chute. Et après, je freine. Quand j’ouvre les yeux, beaucoup de coureurs étaient déjà repartis. Je voyais des gendarmes et des secouristes qui étaient autour de moi mais je ne savais pas ce qui se passait. Ce n’est qu’après, en revoyant la chute à la télé, que certains souvenirs sont revenus. On roulait vite, à 65 km/h environ. Un coureur devant moi est tombé et après c’était l’effet domino.

Le Tour s’est alors arrêté pour vous, dès la première étape…

J’ai été hospitalisé onze jours car j’avais des vertèbres cassées et un gros hématome à la cuisse droite. Sur le coup, on se dit « merde » ! Toute cette préparation pour rien du tout, c’est rageant. Mais après la déception est vite passée, il n’y avait rien à faire de toute façon. Je n’avais qu’à me reposer en regardant les étapes du Tour depuis mon lit d’hôpital.

Juste avant votre chute, il y en avait déjà eu une provoquée par une spectatrice porteuse d’une pancarte. Vous l’avez vécue ?

Non. A ce moment-là, je roulais en tête du peloton pour protéger David Gaudu. J’ai juste entendu qu’il y avait eu une chute mais je n’ai pas tout compris sur le moment. On sait que c’est le Tour de France et qu’il y a toujours plus de nervosité dans le peloton.

Votre directeur sportif Marc Madiot a tout de même poussé un gros coup de gueule après ces chutes à répétition…

Il a eu raison. Car c’est vrai qu’il y a eu énormément de chutes sur ce début de Tour. Plus que sur n’importe quelle course et même plus que les précédentes années.

Comment l’expliquer ? Le Tour de France est-il devenu plus dangereux ?

Alors il y a toujours eu de grosses chutes et des blessés au Tour de France. C’est la plus grande course cycliste du monde. Il y a beaucoup de stress car tout le monde veut briller et être devant. Mais ce n’est pas possible quand on est plus de 180 coureurs. C’est vrai que c’est quand même plus dangereux depuis quelques années. Pourquoi ? J’y ai réfléchi mais je n’ai pas de réponse. On a déjà réduit le nombre de coureurs. On a aussi déjà essayé sans oreillettes et cela n’a rien changé. Il peut aussi y avoir des accidents avec des spectateurs, mais c’est très rare et ce n’est pas ça le problème. Personnellement, je pense juste que le Tour devrait commencer par un prologue ou un chrono par équipes histoire d’avoir un parcours un peu moins stressant.

Avez-vous hésité à remonter sur un vélo après une telle chute ?

Non, car j’avais toujours envie d’être coureur cycliste. Je kiffe vraiment ça, encore plus maintenant que quand j’étais jeune et que je gagnais. Après on sait que c’est dangereux mais les chutes font partie du métier. J’ai été malchanceux sur ce coup-là et voilà. Deux semaines et demie après la chute, j’ai repris le home-trainer. J’ai repris tout doucement pour relancer la machine, c’était dur car les muscles n’étaient plus habitués. Mais j’avais du temps pour reprendre, cela s’est fait progressivement.

Votre famille a-t-elle essayé de vous convaincre de renoncer ?

Ma maman oui. Mais c’est normal, c’est une maman. Ma femme, elle, est une ancienne coureuse cycliste et elle comprend que cela fait partie du métier. Elle m’a seulement dit d’analyser. Car si tu commences à tomber souvent, là c’est le signal que tu es trop vieux et qu’il faut arrêter.

Comment s’est déroulée la course de reprise le 1er octobre lors de la Route Adélie à Vitré ?

C’était bizarre déjà car je reprenais en octobre après trois mois de coupure. J’avais l’impression d’être en début de saison. Mais c’était bien. Je n’ai pas pris beaucoup de plaisir car il faisait un temps affreux mais j’étais déjà content d’être dans le peloton. J’appréhendais un peu avant le départ, je ne savais pas qu’elles allaient être mes sensations et si j’allais avoir peur. Vu que les routes étaient glissantes, je n’ai pas pris trop de risques et je n’ai pas voulu aller trop devant. J’ai gardé mes distances et je suis resté tranquille au chaud dans le peloton.

Vous avez 35 ans et vous venez de prolonger d’une saison. La dernière ?

Cela ne dépend pas que de moi. Mais personnellement, j’aimerais bien faire encore une année de plus. Mais si je vois que je n’y arrive plus physiquement, je ne pousserai pas plus.